J'ai fini il y a quelques temps un grand pavé noir aux allures de livre de sorcellerie. Les rares fois où je me suis promenée, le livre sous le bras, on m'a regardé étrangement, avec mes fripes sombres et mon gros livre bizarre. Qu'en est-il donc, de ce roman, dont j'ai entendu parler un peu partout ?
L'histoire, comme ça :
Il y a des siècles de cela, du temps où la magie existait encore en Angleterre, le plus grand magicien de tous était le roi Corbeau. Enfant d’homme élevé par des fées, le roi Corbeau mêla sagesse féerique et humaine raison pour fonder la magie anglaise. En 1806, année où commence le roman, il n’est plus guère qu’une légende. L’Angleterre est gouvernée par un roi fou, Lord Byron bouleverse les mœurs autant qu’il révolutionne la poésie, les guerres napoléoniennes ravagent le pays… et plus personne ne croit à la pratique de la magie. Or voici que Mr Norrell, le reclus de l’abbaye de Hurtfew, lance un défi aux magiciens théoriciens qui pullulent dans le pays : il prouvera qu’il est le seul véritable magicien du pays. Dans une scène éblouissante, il prête parole et mouvement aux statues de la cathédrale d’York. La nouvelle du retour de la magie en Angleterre se répand jusque dans les frivoles salons londoniens. Pédant, prétentieux, Mr Norrell devient pourtant la coqueluche de la noblesse londonienne. Mais lui veut davantage : aider le gouvernement dans sa guerre contre Napoléon. Il bloque les Français en rade de Brest grâce à une immense flotte anglaise composée de navires nés de la pluie, et dote les côtes britanniques de charmes protecteurs. Aider le royaume d’Angleterre n’est pas l’unique obsession de Mr Norrell. Car il veut aussi, et surtout, éliminer tout rival possible. C’est compter sans la prophétie : Deux magiciens paraîtront en Angleterre. Le premier me craindra ; le second de me voir brûlera. Et bientôt il croise sur son chemin un brillant jeune magicien, Jonathan Strange. Ce dernier est charmant, riche, un brin arrogant, mais imaginatif et courageux. Mr Norrell, séduit, le prend pour élève. Ensemble, ils éblouissent le pays de leurs exploits. Mais leur association tourne vite à la rivalité…
J'ai mis du temps à le terminer, car il est assez difficile de plonger dedans dès les premiers mots. L'entrée et l'immersion m'ont toujours paru assez poussives, en vérité. Cependant, c'est un livre agréable, un divertissement de qualité. On trouve tout au long de la lecture un certain "
esprit anglais" empruntant aux tons du XIXème siècle, à certaines références de l'époque ; le plongeon historique est amusant. A travers les personnages, les différents milieux, on carresse le lecteur dans le sens du poil. Ajoutons à cela un peu de magie, et du mystère : oh, l'intrigue intéresse, l'auteur éveille notre curiosité malgré nous, et à la fin du livre, on se rend finalement compte de l'importance des pions évoqués ça et là tout au long du récit. Tout se met en place progressivement sans que l'on s'en aperçoive. Une galerie de personnages intéressante mais qui aurait sans doute mérité d'être un peu mieux étoffée ; on regrette parfois un certain manque de détail, ou un ton un peu trop allusif. Comme l'on peut déplorer certaines longueurs à certains points clefs du roman. En vérité, j'ai à redire à ce livre, mais en même temps je l'ai beaucoup aimé, et il y a certains passages où j'étais bien incapable de décoller le nez des pages et de retourner à la réalité. L'époque me plaît, le sujet m'intrigue. Que restait-il pour me déplaire ? Un discours trop élogieux et une bien trop bonne réputation, peut-être. En tant que livre sans prétention, je l'aurais jugé excellent. Quand on lit en quatrième de couverture une référence à Tolkien et une autre à Austen, forcément, on reste un peu plus froid. Cela n'en reste pas moins une très agréable lecture, qui m'a transportée dans un monde peu lointain et très imaginaire.
Sourire, à l'apparition du personnage de Lord Byron, en fin de livre. Déception pour les dernières pages, quelque chose m'a soudain manqué, je ne saurais dire quoi.